DOSSIER
Le voyage se féminise
Oui, mesdames, vous aussi, vous avez le droit de voyager ! Visiblement, le refrain a pris car les femmes sont de plus en plus demandeuses d’expériences solo ou en groupe. Leurs destinations préférées : Bali et le Vietnam. Pour les encourager et les accompagner, elles peuvent désormais compter sur La Voyageuse et Copines de voyage, deux plateformes qui surfent sur la vague du voyage au féminin. Décryptage dans Jet-lag Magazine n°17.
Par Christel Caulet
octobre, 2020
De la suite dans les idées...
Christina n'est pas du genre à baisser les bras. La crise du Covid-19 ? « C’est notre meilleur mois ! » L’idée originale de son entreprise : « Personne n'y croyait au départ, à part moi ! » Cette Taïwanaise de 23 ans, installée à Bordeaux, a une volonté hors norme et le désir de créer une véritable communauté de femmes qui voyagent. Installée en France depuis cinq ans, elle veut bousculer les idées reçues avec son projet La Voyageuse. Pour elle, voyager en solo ne devrait pas être impossible pour les femmes. « Je sais que certaines femmes hésitent à partir car elles ont peur des réactions masculines, ne savent pas si elles seront en sécurité. En général, c'est un facteur bloquant au départ en voyage. » Christina Boixière s’est servie de sa propre expérience avant de lancer son entreprise. « Je suis partie en voyage en Thaïlande quand j’avais 17 ans. Toute seule ! Mais j’ai menti à mes parents car sinon, ils ne m’auraient jamais laissée partir. J’ai ainsi découvert la sensation de liberté totale. C'était ma première expérience de voyage en solo. En général, je dors chez l’habitant pour rencontrer les locaux, c’est toujours plus sympa. Mon bac en poche, j’ai entamé un autre voyage, en Europe cette fois. C'est là que l’idée voyage a germé dans ma tête », confie-t-elle.
"Quand j'ai commencé à voyager, j'en ai beaucoup discuté avec mes proches et mes copines. Elles étaient toutes inquiètes pour moi. Elles avaient peur et me disaient que j'étais folle d'oser partir toute seule", confie Christina Boixière.
« Mes copines étaient toutes inquiètes pour moi. Elles avaient peur et me disaient que c’était dangereux, que j’étais folle de partir toute seule comme ça », explique Christina. Il fallait donc répondre à leurs craintes et sécuriser les femmes dans leur projet de voyage. « Quand j’ai commencé à voyager, j’en ai beaucoup discuté avec mes proches. Je comprenais leur réticence mais l’idée de ne pas aller découvrir d’autres parties du monde m'était insupportable. Alors j’ai pris mon baluchon et j’y suis allée. Finalement, j'ai dormi chez plein de gens et il ne m’est rien arrivé. A part une fois où mon hôte était bizarre », concède-t-elle. Au retour de ses voyages, elle réfléchit à chaque fois « à ce qui pourrait être fait pour améliorer [mon]sort et [ma]sécurité en voyage. C’est comme ça que j’ai eu l’idée de rassembler des femmes qui voyagent ensemble », sourit-elle.
Christina a toujours eu cette envie de changer le sort des femmes et de les aider à voyager. Après de multiples expériences dans des start-up, elle s’attèle à son projet. « Rien n’a été évident. Il a fallu convaincre et expliquer à des hommes pourquoi les femmes ont le droit de voyager en solo. La plupart me répondait que mon projet ne tenait pas la route et que ce n’était pas possible. J’ai tout entendu. Puis, à force de persévérance, je me suis lancée et j’ai finalement lancé mon entreprise. L’idée était simple : proposer des hébergements où la sécurité est garantie partout dans le monde avec une communauté de voyageuses qui s’entraident et s'épaulent. Car pour moi, le partage d’expériences est crucial et le contact, capital. Je voulais mettre en relation ces femmes avec les petites nouvelles. On a donc lancé un pass qui permet aux femmes de partir chez d’autres femmes. Les réservations passent par notre plateforme ; on a déjà plus de 1500 femmes qui ont proposé de recevoir ces voyageuses. Bien sûr, on vérifie leur identité et leur motivation avant tout. La connexion humaine est obligatoire en quelque sorte. Cela permet ainsi des rencontres authentiques », confirme-t-elle.
Un marché féminin qui explose !
Avec un marché en pleine explosion, le tourisme féminin a donc de beaux jours devant lui. 60 millions de femmes sont considérées comme des voyageuses. « Il y a de belles découvertes pour certaines. J’ai eu une cliente de 73 ans qui a entamé un voyage au long cours et qui a bénéficié de notre offre. Sans vous parler des femmes qui après le confinement ont voulu profiter de la vie en partant voyager. »
La Voyageuse fait partie des quatre start-up (sur 5000) reconnues par l’OMT (Organisation mondiale du tourisme) comme Innovation du Tourisme Durable. Elle a aussi été sélectionnée « Coup de Cœur » du Salon Destination Nature qui devait se tenir à Paris du 12 au 15 mars. En juin, quand la plateforme a repris du service, plus de 800 nouvelles voyageuses françaises se sont inscrites et sont parties (re)découvrir leur propre pays à la rencontre des 1 550 hébergeuses de confiance prêtes à les accueillir gratuitement.
Relation humaine
Après le déconfinement, la plateforme de La Voyageuse est devenue un choix idéal pour des femmes qui veulent une bouffée d’air et faire de nouvelles rencontres. La relation humaine est au cœur du concept, proposant ainsi une solution à l’opposé du tourisme de masse. Les femmes choisissent La Voyageuse pour la sécurité mais aussi par conviction. Pour elles, l’hébergement chez l’habitant est le moyen le plus écologique de voyager. Cela favorise une consommation différente du touriste lambda, plus proche de l’immersion culturelle, favorisant le « vivre comme l’habitant ». Beaucoup d’entre elles sont déjà sur les routes et réduisent leur empreinte carbone en privilégiant la marche à pied, le vélo ou le covoiturage.
L’objectif à terme : une hébergeuse dans chaque commune de France... Puis dans les autres pays... « Sans être militante pour le droit des femmes, je suis convaincue que c’est une manière facile et efficace d’abattre les préjugés. En permettant aux femmes de voyager en sécurité, il semblerait qu’elle révolutionne à sa manière l’industrie du voyage », se réjouit Christina.
L’objectif à terme : Une hébergeuse dans chaque communes de France... Puis s’étendre vers d’autres pays... Une solution adaptée pour permettre de voyager aux femmes en toute sécurité. "Moi, je suis convaincue que c'est une manière facile et efficace d'abattre les préjugés... Sans être militante pour le droit des femmes, il semblerait qu'elle révolutionne à sa manière l'industrie du voyage en permettant aux femmes de voyager."
Croissance fulgurante
75% des utilisatrices de La Voyageuse n’avaient jamais osé partir en solo auparavant. La plateforme répond ainsi à un besoin d’indépendance des femmes ; une tendance qui connaît une croissance fulgurante. En sécurisant les voyageuses solo, leur solution pourrait ainsi favoriser l’économie du tourisme et, par l’intermédiaire de ses habitants, promouvoir les zones moins fréquentées. Les hébergeuses étant localisées autant à la ville qu’à la campagne, La Voyageuse amène une régulation des flux touristiques vers les zones plus rurales. « On a beaucoup de femmes qui ont souhaité partir faire de la randonnée en France notamment », précise Christina. Pour y parvenir, la start-up travaille avec des institutions touristiques locales comme les offices de tourisme. Le Comité régional du tourisme de la Région Nouvelle-Aquitaine lui apporte également son appui pour obtenir l’inscription d’un plus grand nombre d’hébergeuses sur la plateforme.
Copines de voyage pour assumer cette volonté de voyager
Autre concept qui cartonne : Découvrir le monde entre filles, dans une ambiance fun et décontractée. Voyager entre filles créé une énergie unique. Du citybreak à partager le temps d’un week-end au long séjour au bout du monde, les voyages « Copines de voyage » vous permettront de retrouver les ingrédients clés d’un voyage au féminin : du partage, du sens, de la sécurité et du fun ! La promesse est de vous faire vivre des expériences et des rencontres qui vont changer votre façon de voyager. Avec plus de 15 000 voyageuses au compteur, cette agence pour les femmes qui bougent propose des destinations classiques et d’autres plus originales. Le principe est simple : « L’idée est vraiment de dire aux femmes que oui, elles aussi, elles peuvent voyager. Ce n’est pas réservé qu’aux hommes. Puis ensuite, il y a aussi beaucoup de femmes qui étaient coincées. Entre les vacances du mari qui ne tombent pas toujours au même moment et les envies différentes... Pourquoi devraient-elles rester à la maison et ne pas partir découvrir le monde ? Du coup, on a voulu les aider en mettant au point des séjours adaptés à leurs envies », explique Emilie Straub, directrice marketing de Copines de voyage. De quoi multiplier les opportunités... Cette agence de voyage est née du fruit d’une évolution du marché. Avant, les femmes n’osaient pas partir seules. « Désormais, elles discutent entre elles sur notre plateforme et lorsque des affinités se créent, elles choisissent une destination et partent. Cela va du week-end farniente dans de belles villas au Maroc à une semaine à parcourir la Mongolie à cheval… Il y a un nombre incalculable de destinations. » Bien sûr, quand les femmes partent, elles ont un programme qui leur est transmis. « On est sur de petits groupes, entre 8 et 10 personnes maximum, pour faciliter la cohésion. En général, nos clientes ont entre 25 et 45 ans, elles peuvent être célibataires comme mariées... » De quoi réaffirmer la passion du voyage au féminin !